Entretien avec Loïg Chesnais-Girard, Président de la Région Bretagne

20 January 2021
Entretien avec Loïg Chesnais-Girard, Président de la Région Bretagne

Depuis le 1er janvier 2021, le Royaume-Uni ne fait plus partie du marché unique et de l'union douanière de l'Union européenne. L'UE et le Royaume-Uni ont ouvert un nouveau chapitre de leurs relations, fondé sur un accord de commerce et de coopération. Les conséquences de cette séparation sur les villes, les régions et leurs citoyens peuvent être ressenties à travers toute l'Europe. Les femmes et hommes politiques progressistes locaux et régionaux font leur part pour maintenir des liens solides avec les villes et les régions du Royaume-Uni. Nous nous sommes entretenus avec notre membre Loïg Chesnais-Girard, Président de la Région Bretagne, dont les liens géographiques, économiques, culturels et humains avec le Royaume-Uni sont particulièrement intenses.

Au début de cette nouvelle année, avec le Brexit définitif, une page se tourne pour les collectivités régionales et locales. Quel est l'impact majeur ressenti pour les villes et régions des deux côtés de la Manche? Voyez-vous de nouvelles pages dans la relation entre collectivités britanniques et européennes s’ouvrir?

Bien évidemment l’impact est d’abord économique, avec certains secteurs plus impactés que d’autres comme la pêche. Cela affecte aussi les coopérations scientifiques et universitaires. Mais c’est avant tout un traumatisme culturel. Nos liens sont forts et anciens avec les villes et régions du Royaume-Uni, or ils seront forcément affaiblis par le Brexit. Je remarque toutefois que pour nos partenaires britanniques le choc est encore plus fort. Ils prennent pleinement conscience de tous les avantages que leur procurait l’Union. Je sens une volonté de trouver de nouvelles voies de coopération. En ce sens oui, une nouvelle page va s’écrire. Nous allons devoir être inventifs, mais l’envie est là.

Votre région, la Bretagne, est particulièrement exposée aux effets du Brexit, notamment dans le secteur de la pêche. Comment allez-vous soutenir les entreprises et l’emploi? Pensez-vous que la réserve d'ajustement au Brexit puisse avoir un effet d’amortissement en Bretagne?

Heureusement nous n’avons pas attendu le Brexit pour en anticiper les conséquences. Comme d’autres Régions nous travaillons depuis 2 ans pour préparer les entreprises qui ne sont pas habituées aux démarches à l’export hors UE. Comme tout bouleversement, le Brexit présentent des risques, mais aussi des opportunités. La Région Bretagne pourra aider à s’en saisir, notamment par son rôle dans la formation professionnelle. J’attends beaucoup de la réserve d’ajustement. C’est le moment pour l’Union de montrer qu’elle protège ses citoyens et ses territoires. Mais je crains qu’à l’échelle de l’Union le montant de 5 milliards d’euros soit insuffisant et aboutisse à du saupoudrage. Je suis d’avis qu’il faudra bien cibler cette réserve pour qu’elle soit réellement efficace.

La Bretagne a tissé des liens humains très étroits avec les voisins d’Outre-Manche, notamment culturels. Quel sera l'impact de l'abandon du programme Erasmus+ par le Royaume-Uni en Bretagne? Pensez-vous à d'autres formes de coopération pour maintenir le lien entre les générations futures? 

L’abandon d’Erasmus+ par le Royaume-Uni est une catastrophe. J’ai du mal à comprendre en quoi réduire les perspectives de sa jeunesse est une bonne chose. En Bretagne, le Royaume-Uni était la première destination de nos jeunes en Erasmus. Mais je ne me résigne pas. Nous avons déjà des coopérations universitaires très actives avec le Pays de Galles. Je pense que les régions peuvent proposer des alternatives. Elles ne pourront pas remplacer Erasmus bien sûr, mais peut-être atténuer les conséquences de ce choix pour que nos jeunes continuent à échanger.

Vous présidez au sein du Comité européen des Régions de l’UE le groupe de contact chargé de maintenir le lien entre les collectivités des 27 pays membres de l'Union européenne et du Royaume-Uni. Quelles seront ses priorités pour cette année?

Je suis agréablement surpris par l’appétence suscitée par ce groupe de contact. Nos partenaires britanniques y sont très assidus et désireux d’intensifier le travail avec nous. Je crois que les régions peuvent jouer un rôle essentiel en maintenant des liens que les états risquent d’avoir plus de mal à entretenir, au moins pendant quelques années. Nous pouvons contribuer à préserver l’avenir, car je ne vois pas l’avenir de l’Europe sans un partenariat étroit avec le Royaume-Uni, d’une manière ou d’une autre. Je pense que nos travaux cette années vont devoir commencer à se concentrer sur quelques sujets concrets, car nous ne pourrons pas tout faire à la fois. La question de la mobilité des jeunes me semble être un sujet intéressant pour commencer, si nos amis britanniques en sont d’accord.

 

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Loïg Chesnais-Girard est le Président du groupe de contact CdR-Royaume-Uni. Les autres membres du groupe PSE du groupe de contact sont: Ximo Puig i Ferrer, Président de la Région de Valence en Espagne; Antje Grotheer, Vice-présidente du Parlement de la ville de Brême en Allemagne; et Isilda Gomes, Maire de Portimão au Portugal.

 

Copyright de la photo: Thomas Crabot –Région Bretagne 

 

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